Étude de plusieurs cas récents d'ongulanthropie
Dans la région niçoise.


Au cours des dernières années, une recrudescence de phénomènes inexpliqués semblant liés au mythe de l'ongulanthropie a été observé dans le moyen et haut-pays niçois. Ces phénomènes se cantonnent pour l'heure dans les hautes vallées riveraines du Parc National du Mercantour, mais il n'est pas impossible que d'autres cas analogues aient été passés sous silence. Bien que les derniers récits relatifs à ce mythe remonte au début du siècle dernier, un énigmatique ex-voto a été photographié dans une chapelle de la région (voir par ailleurs). L'icône anonyme représente un champ vraisemblablement de blé horriblement brouté par une hideuse créature laineuse à la posture bipède, le tout surmonté de la phrase "MIEUX VAUT MON PRÉ QU'MOI !" détail sinistre s'il en est, la peinture naïve semble avoir été exécuté sur une toile en laine…


Lors de l'enquête de terrain, il ne fut pas facile de recueillir des témoignages. Force était de constater qu'à l'orée du 21ème siècle, l'ongulanthropie fait toujours peur. Hors micro ou caméra, certains osaient cependant témoigner. À mots couverts, presque à la dérobée, certains nous parlaient de bouts de laines trouvés ici ou là, de prés mystérieusement tondus, et de sinistres bêlements, entendus le soir venu. L'on nous confia ainsi qu'un potager avait récemment reçu la visite de l'une de ces "brebis-garou". L'infortunée propriétaire nous affirma, dans son parler pittoresque, que "c'te espèce ed p'tite saloperie, s'en est allé à me boulotter jusqu'aux tiges ed canisse qui tenaient mes ch'ti plants ed' belles tomates !" On comprend dès lors l'émoi que la résurgence d'une telle créature infernale peut faire naître au sein des populations locales, déjà mis à mal par le retour du loup et la chute du cours du Yen.

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Photos 1 & 2 : Crane d'un ongulanthrope juvénile. Notez qu'il lui reste encore quelques dents de ruminant... L'horrible mutation ne s'était pas encore achevée... (Collection de l'auteur)


Pourtant même si l'ongulanthropie continue de faire peur, certains l'abordent désormais le sujet sans préjugés. Pour preuve le professeur Pascal B. de l'Université de Castérino qui n'hésitait pas à déclarer, il y a quelques années dans une interview sur une grande chaîne nationale d'information : "Nous avons tous dans nos gènes des parcelles de fromage auxquels le pastoralisme aura profité". L'ongulanthropie serait donc pour certain moins une fatalité qu'un choix. De là à parler de droit à la différence, il n'y a qu'un pas que nous nous garderons cependant de franchir.


Rappelons que selon la légende, l'ongulanthropie est le résultat de la pratique d'une cérémonie pastorale païenne connue sous le nom "d'intronisation de l'ongulé" et unanimement condamnée tant par l'église que par la communauté vétérinaire. Le plus célèbre ongulanthrope fut certainement un dénommé Dédé, lequel selon des témoins se contenta de "rire dans son bouc" à son arrestation. Lors de la perquisition accomplie à son domicile, de nombreuses photos de Dolly la brebis clonée furent retrouvées, ainsi qu'une tête de veau avariée dans son frigo. Une cellule de soutien psychologique avait à l'époque été mise en place pour porter assistance à son troupeau, et tout particulièrement au bouc, particulièrement choqué.


Pourtant ce qui inquiète aujourd'hui les autorités, bien plus que ces cas isolés et extrêmes, c'est la recrudescence des apparitions d'ongulanthropes. On parle déjà de cas de brebis-garous attaquant des meutes de loups dans les Hautes-Alpes et n'en laissant que quelques touffes de poils abominablement ruminés ; d'hommes-bouc dans la vallée de la Tinée claudiquant sur les sentiers et terrorisant les habitants du cru, d'horribles bêlements auraient été d'ores et déjà entendus à la lisière des grandes villes du littoral et de nombreux bergers affirment avoir à plusieurs reprises surpris d'inquiétants conciliabules dans les bergeries, à l'heure de l'apéro. Une cellule d'enquête a été mise en place par la préfecture : le Bureau d'Etudes Ethnologiques Et Historique (le B.E.E.E.H.). Sa mission consiste à tenter de trouver une solution aux nombreux problèmes que pose aujourd'hui la résurgence de l'ongulanthropie dans les communautés agropastorales rurales du département.


H.M.

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